Espace adhérents :

Hackathon COORACE : "En quoi les démarches d’amélioration continue contribuent au développement des territoires solidaires et à la reconnaissance des acteurs ? "

31 juillet 2018

Lors du hackathon COORACE, la table ronde du 13 juin au matin "En quoi les démarches d’amélioration continue contribuent au développement des territoires solidaires et à la reconnaissance des acteurs ? "  a réuni :

  • Etienne Laurent, spécialiste des démarches d’amélioration continue dans l’ESS
  • Marion Martinez, chargée du développement du label RSE Lucie
  • Gilles Bon-Maury, secrétaire permanent de la plateforme RSE, France Stratégie
  • Bruno Lasnier, membre du Conseil supérieur de l’ESS, coordinateur du MES
  • Eric Beasse, Secrétaire général COORACE

Etienne Laurent introduit en revenant sur l’histoire de l’ESS, et l’apparition des démarches d’amélioration continue, qu’il divise en trois grandes périodes.

  • 70-2000 : la prise de conscience des acteurs et chercheurs et l’émergence de ce nouveau modèle économique ; une période d’éveil des consciences sur ces alternatives. Il cite Jean-Louis Laville : « Un agir démocratique, où les rapports sociaux de solidarité priment sur l’intérêt individuel ou le profit matériel». L’IAE émerge également à cette période. 

Etienne Laurent décrit ensuite la période de structuration de l’ESS. Elle voit la création de nombreux réseaux, les structures se présentant principalement selon deux modèles :  

  • Un modèle territorial/régional
  • Un modèle vertical, en filière

Les démarches d’amélioration continue apparaissent, avec plusieurs normes identifiées. De nombreux acteurs de l’ESS mettent en effet en place à ce moment précis des chartes qualité, des labels. C’est, par exemple, l’émergence des proxim’Services pour COORACE. Deux démarches de création de référentiels sont utilisées 

  • la co-construction, pas à pas, avec les acteurs de terrain, via des formation/action notamment
  • une démarche plus verticale via des comités d’experts.

Cette période a aussi vu naitre la libéralisation de certains secteurs comme celui des services à la personne avec une multiplication des acteurs. Cet élément de concurrence entraine une nécessité forte de distinction. C’est une des bases des démarches qualité : on y met de la performance et de l’éthique pour se différencier des autres acteurs en présence. 

Pour Etienne Laurent, il ne faut pas concevoir la démarche qualité comme une norme à respecter, sinon, on perd de nombreux acteurs en route. Il faut l’envisager véritablement comme un marchepied pour aller plus loin dans nos ambitions sociales. Il faut donc qu’elle soit comprise comme un levier et une stratégie sur les territoires.

La démarche d’amélioration continue doit être considérée, pour Etienne Laurent, comme une hélice à trois palmes.

  • plus-value et éthique sur le territoire
  • démarche de progrès. Elle présuppose une vision, avec des étapes pour la mettre en place ; il faut être très factuel et opérationnel, en permettant le passage entre une vision et des actes quotidiens.
  • la régulation qui va permettre de régler des tensions idéologiques par exemple. La démarche qualité nous oblige à rapprocher nos points de vue, à aller vers un consensus. Cela va dans le sens d’une progression dans les territoires, d’accompagnement au changement.

Etienne Laurent finit par introduire la période dans laquelle nous sommes actuellement, c’est une période de bousculement, avec l’uberisation du monde du travail. Comment situe t-on dans la notion de  « start-up nation », quel lien avec les territoires ? Pour Etienne Laurent, Il faut une véritable volonté de changement d’échelle comme acteur économique, politique et social du territoire.

Marion Martinez, a, quant à elle, évoqué l’intérêt de la RSE, en présentant le label Lucie qui existe depuis 2007. Selon elle, la RSE est une démarche d’amélioration continue qui contribue au développement des territoires et à la reconnaissance des acteurs. En effet, la RSE c’est l’application des principes du Développement Durable au monde de l’entreprise : environnement, dimension économique et sociale. La norme ISO 26000 est le cadre de référence. C’est une norme non certifiable, elle apporte des conseils, des orientations, des directions, des bonnes pratiques. Le label Lucie est basé sur cette norme avec le référentiel Lucie 26 000, qui donne le cadre de la RSE pour les entreprises qui s’engagent avec 7 questions centrales : environnement, qualité de vie au travail, de relations avec les fournisseurs, gouvernance, Droits de l’Homme, impacts sur le territoire etc…

Le rapport de la RSE avec la démarche qualité, c’est le questionnement sur l’impact de son activité, sur ses parties prenantes internes, comme les salariés ; mais aussi externes comme les fournisseurs. Pour une démarche RSE crédible et réussie, il faut prendre en compte l’intégration globale avec ses parties prenantes. Avec la RSE, on sort d’une vision court-termiste, en réfléchissant aux impacts de chacune de ses activités, et créant des valeurs positives sur le territoire.

Gilles Bon-Maury est secrétaire permanent de la plateforme RSE, placée sous la responsabilité du 1er Ministre ; cinquante organisations membres participent à cette plateforme :  des syndicats, des syndicats d’employeurs, des associations, des salariés, des chercheurs et des institutions publiques. La question qui s’est posée aux politiques publiques, c’est de savoir comment amener les entreprises à être plus responsables vis à vis de l’environnement, de leurs salariés, de l’ensemble des parties prenantes concernées. La création du Global Compact, sous l'égide de l'ONU, veut prendre en compte les dimensions de gouvernance mondiale, sachant que pour les multinationales, l’enjeu dépasse de loin le cadre des États.

En France, nous avons eu une loi sur les régulations économiques en 2001, avec obligation pour les entreprises de reporter leurs externalités positives dans le rapport annuel présenté aux actionnaires. Le Grenelle de l’environnement a été une étape supplémentaire, avec une gouvernance élargie. La France a beaucoup contribué à l'émergence de la norme ISO 26 000. L'UE a également produit une recommandation afin d'inciter les Etats Membres à mener des politiques en la matière. La plateforme RSE a été constituée en 2013, avec une volonté de créer une stratégie nationale. Ainsi, la plateforme créé un référencement des labels RSE par secteur. France Stratégie cherche aussi à comprendre comment ces labels vont mettre en valeur les structures parties prenantes.

Il existe deux vecteurs pour mettre en place la RSE au sein des PME :

  • Le territoire avec les coopérations
  • La filière avec les fédérations sectorielles et un référentiel adapté au métier

C’est ce dernier chemin que la plateforme préconise, avec la promotion de labels RSE sectoriels. La plateforme travaillera jusqu’en 2019 à un référencement des différents labels qui existent, en tirant des leçons des différents retours d’expérience. Elle fera ensuite connaître ses recommandations. Une fois que seront disponibles les instruments qui permettront de dire si telle ou telle entreprise est responsable, il pourra y'avoir des repercussions en termes de politiques publiques : fiscalité, simplification administrative, commande publique mais aussi privée.

Bruno Lasnier, coordinateur du MES (Mouvement pour une économie solidaire), débute son propos en indiquant que, le MES, depuis sa création en 2001, a toujours réfléchi à sa démarche progrès, comme un outil stratégique et participatif qui permet de se poser la question de la cohérence et de l’adéquation entre les finalités, les actions et pratiques mises en place. Le mouvement est membre d’ESS France et du Conseil Supérieur de l’ESS, qui a créé un guide sur l’amélioration des pratiques en continue.

Le Conseil Supérieur de l’ESS a conscience que les structures sont souvent déjà investies dans des démarches de progrès. Il a donc souhaité que le guide ne soit pas enfermant, et permettre aux entreprises ayant déjà des démarches existantes de pouvoir les intégrer au sein du guide, qui est construit sur 8 axes dont :

  • Organisation de la gouvernance
  • Politique sociale responsable
  • Intégration des bénéficiaires dans l’élaboration de l’offre
  • Ancrage territorial
  • Environnement
  • Éthique et déontologie : adéquation entre les finalités et les méthodes

Il y’a de nombreuses questions qui sont posées au sein du guide, et plusieurs indicateurs proposés. Les entreprises de l’ESS peuvent ainsi se concentrer sur les thèmes qui les intéressent et y trouver des ressources pour avancer.

Pour finir, Eric Beasse a expliqué le positionnement de COORACE dans la démarche d’amélioration continue. COORACE s’est donné un objectif ambitieux. La structure s’est engagée à ce que l’ensemble des adhérents soient, à termes, dans une démarche d’amélioration continue, avec des outils dédiés comme le CAP ou la démarche qualité CEDRE ISO 9001. Pour l’instant un tiers des adhérents sont dans une démarche d’amélioration continue, et 25% sont certifiées CEDRE ISO 9001.

Il faut poursuivre le travail de sensibilisation sur la démarche qualité comme un marchepied, et comme une valeur ajoutée pour

  • maintenir une réflexion au sein de la structure autour du sens de son projet et de son action, maintenir en éveil les fondamentaux. COORACE a ainsi engagé une démarche de développement des territoires solidaires avec le positionnement de nos activités autour de trois axes : la création d’activités et la contribution au développement économique ; la sécurisation des parcours socio-professionnels ; l'animation des territoires.
  • être capable de mobiliser l’ensemble des salarié-e-s et notamment les salarié-e-s en parcours. Il s'agit de permettre à chacun d’avoir sa place y compris dans notre réseau. Pour Eric Béasse, c’est un enjeu majeur.
  • permettre de s’adapter aux évolutions des territoires et évaluer l’UST (utilité sociale territoriale). Cette démarche UST renforce aussi le capital social des territoires. 
  • être en capacité de travailler avec l’ensemble des parties prenantes du territoire, et les faire participer à un projet commun (collectivités, acteurs de l’ESS, clients et partenaires économiques).
  • permettre une meilleure visibilité de nos entreprises.

Eric Béasse évoque trois enjeux pour l’avenir :

  • L’amélioration continue est le fer de lance de nos actions, dans une démarche continue de progrès.
  • Une meilleure cohérence entre les pratiques de nos adhérents grâce à l’outil CAP
  • Se distinguer : une meilleure visibilité, une meilleure crédibilité et attractivité afin de donner envie de rejoindre le réseau COORACE.