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Des salarié.es en 1ère ligne face à la crise. Et après ?

03 février 2021

Le Hackathon a été l’occasion de donner la parole, lors du débat politique, à 3 salariés de nos entreprises d’utilité sociale territoriale. En première ligne face à la crise, ils ont accepté de nous parler des satisfactions qu’ils tirent de leur emploi et des difficultés, surtout du manque de reconnaissance et de visibilité de leur métier dans la société. Merci à Sylvie, Noëlle et Jérôme de nous avoir partagé leurs quotidien et aspirations.

Sylvie se présente comme une jeune grand-mère.  Au début de son parcours professionnel, elle a d’abord été ouvrière puis serveuse, elle s’est ensuite arrêtée de travailler pour s’occuper de ses filles. Au cours de sa reprise professionnelle, elle a effectué un stage auprès d’une personne âgée « C’est là que ma carrière d’auxiliaire de vie a démarré. » précise t-elle. Sylvie a appris le métier puis a passé le diplôme DEAVS (auxiliaire de vie) par les acquis de l’expérience. « Ce métier me va très bien. On apporte une présence aux personnes âgées. C’est le point le plus positif, la relation. C’est un métier utile socialement ». 

Malgré toute cette satisfaction, les conditions de travail restent difficiles : « La difficulté de notre travail, c’est le temps partiel subi. Surtout les jeunes qui arrivent, ils font parfois très peu d’heures dans le mois. Du coup, ils ne restent pas. C’est normal, on ne peut pas vivre avec 800 € par mois. Les 3/4 ne peuvent pas se loger seul. Le logement devient vite le principal problème. Le salaire et les indemnités kilométriques n’ont pas bougé depuis 10 ans et on travaille toujours avec notre voiture personnelle » 

Puis Sylvie évoque la situation pendant la période Covid : « Notre direction a bien anticipé le début de crise. Nous avons eu assez rapidement les masques. Mais cette crise, même si on a été en première ligne, n’a rien changé au niveau de notre salaire.  Aucune prime même départementale ne nous a été versée ». Même retour pour Noëlle qui a réalisé 4 années de formation pour devenir auxiliaire de vie. Elle apporte de l’aide aux personnes âgées et aux personnes en situation de handicap notamment atteintes de la maladie d'Alzheimer, avec 8 et 12 interventions dans une journée et un week-end sur trois. Noëlle évoque l’amour pour son métier, l’attachement qui se créé avec les personnes qu’elle accompagne pour certaines depuis 10 ans « On donne beaucoup de soi dans ce métier. Parfois, on est le seul lien social pour ces personnes. Bien entendu, je ne dois pas me laisser imprégner sur ma vie privée. Il ne faut pas s’attacher trop. »

Comme Sylvie, Noëlle pointe les difficultés liées au salaire, la problématique des temps de transport et toutes les questions qui sont apparues avec la crise sanitaire, notamment les difficultés avec les familles : « Le caractère de certaines personnes a changé avec la crise. Les familles des bénéficiaires étaient très agressives et attendaient beaucoup de nous car elles ne pouvaient pas aller voir leur proche. J’étais sollicitée sur des choses qui n’étaient pas dans mes cordes, comme faire les papiers administratifs par exemple.  Pour certaines familles, je suis une femme de ménage. Elles considèrent peu mon travail. Certaines veulent réduire les heures au détriment de la qualité et de la relation avec les personnes.  Au risque de devenir maltraitant. »

Noëlle et Sylvie regrettent l’invisibilité dans laquelle elles sont plongées : « Si les personnes âgées sont encore chez elles, c’est grâce à nous, on a un métier difficile qui ne se voit pas. »

Pour elles, l’échange entre pairs, la dynamique d’équipe sont indispensables, comme nous l’explique Noëlle « Dans les entreprises, il faut améliorer la communication ! L’entreprise c’est comme une pyramide et ça change tout le temps dans les bureaux. L’administration ne connait pas bien notre métier. Je suis sur le seul secteur où l’équipe des auxiliaires de vie se parle beaucoup.  Il faut se soutenir, on en a besoin. On doit être solidaire entre nous. On essaie de déjeuner ensemble quand c’est possible ».

Pour elles, le dialogue social est fondamental « Je suis élue au CSE et déléguée syndicale à la CFDT, explique Sylvie.  Je me suis engagée pour améliorer la circulation de l’information dans l’entreprise et revoir la convention collective. Les temps de délégation permettent de rencontrer les collègues des différents secteurs. »

Même constat pour Jérôme, salarié chez Chorus à Decazeville en tant que ripeur. Après un accident du travail, il a pu rebondir avec l’appui de l’association, il exerce les activités de ripeur et d’agent d’entretien des espaces verts : « en tant que ripeur, je travaille en équipe. Je suis derrière le camion. Mes horaires de travail sont 5h30 /12h30. Si la boite me prend en CDI je reste. J’aime bien ce boulot. Ça me permet de faire autre chose l’après-midi. » Jérôme note plutôt positivement l’impact de la crise sanitaire sur le regard de la société sur son métier : « Depuis le confinement, le métier de ripeur à une plus grande place. Avant c’était un métier dégradant pour les gens, maintenant c’est un métier indispensable. »